Sélection du message

Der Schnee.

Du vent. De la neige. Putain. Rien d'humain. Tu écris quoi ? Depuis des mois, tu n'en sais rien. Tu as rencontré son visage. Son si...

samedi 14 mars 2015

Le Labyrinthe, le sexe et le visage.

Lorsqu'il entre, la chose est disposée sur une sorte de sofa. Plutôt une table de skaï blanche et légèrement inclinée de telle sorte qu'elle soit disponible à mi-hauteur, accessible à un homme debout, cuisses écartées, membre érigé, les pieds bien à plat sur le sol.
Elle a été préparée durant des heures, revêtue d'un corset noir à lacets ; elle est nue dans son porte-jarretelles et ne porte que des chaussures, des sortes de mules à longs talons et sans attaches sur la cheville. La légèreté de ses sandales semble annoncer une chute toujours imminente mais qui, miraculeusement n'a jamais lieu : les frêles souliers de satin battent la cadence du corps bouleversé mais ne tombent pas. Jamais.
Elle avait été lustrée, huilée, poudrée. Outrageusement maquillée. Colorée. Décolorée. Epilée. Ecervelée.

C'est un bel objet lisse, sans aspérités, sans irrégularités, brillant et fluide, fondu dans une seule coulée, apprêté et posé sur le sofa comme une fleur artificielle.

Il est debout. Il ne la regarde pas. L'objet n'a pas de visage.  De la paume de la main,il fait basculer le corps, expose le sexe replié entre les cuisses. Ses lignes pures et longues occupent tout l'écran,. Au centre du paysage, la pulpe d'une lèvre forme une courbe plus proéminente. Le tableau de lignes abstraites est d'une beauté à couper le souffle.
Il palpe d'un doigt, froisse la corolle pliée, écarte légèrement. Puis il flatte, malmène l'objet, le claque, le griffe. Il pose sa bouche, l'humecte de salive. Il enfonce, détruit et poursuit son saccage.
Je m'approche et je caresse les cheveux, le visage ignoré. Je le fais en guise de consolation. Puis la caméra vient se fixer sur la fleur froissée, dépliée maintenant. Le sexe. Ouvert. La profondeur. Béante.
Lentement j'efface les couleurs du visage. Je retire le masque.

Dans les autres pièces sont disposées d'autres femmes. J'ignore le nombre total des chambres, le silence est effrayant et presque parfait, il n'y a d'autre bruit que le vent, le vent des cris, des chairs qui claquent les unes contre les autres: flap, flap, flap. Au coeur du labyrinthe peuplé par ce vent noir je me couche sur le sol et je trace une série de signes, comme les lettres d'un rêve qu'on croit comprendre et qui se brouillent et s'évanouissent aussitôt. Car je sais que ce visage peut dans une seconde, une fraction de seconde, se dissiper comme un visage de songe.
  Nous ignorons la mort. Mais ces bruits, ces han ces flap ce vent noir ce réseau de pierre ce froid ces objets disposés  sont la mise en scène. La chorégraphie avant que tout s'arrête. On peut se blesser longtemps sans mourir. Sentir qu'on est vivants.  Avec tous ces bruitages, ces cris, ces gémissements. Avec les objets et le décor.
Je distingue enfin le visage. C'est un visage enfantin et souverain. Il me sourit. J'essaie d'embrasser son front, ses joues, ses cheveux, ses lèvres, j'essaie avec ferveur de l'embrasser partout, partout, mais je ne rencontre que la texture lisse et glacée du miroir.

1 commentaire:

  1. Étreinte lisse artificielle et sans profondeur c'est le sortilege de l'image qui jalouse la chair.

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